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reactions des medias - Blog gérontologique de Richard Lefrançois
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  • Richard Lefrançois
  • Retraité et professeur associé (Université de Sherbrooke, Québec), Sociologue, gérontologue
  • Retraité et professeur associé (Université de Sherbrooke, Québec), Sociologue, gérontologue

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20 octobre 2007 6 20 /10 /octobre /2007 15:44

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L’ENTREVUE

Vous êtes un baby-boomer de la toute première vague. Parlez-moi de cette génération.

C'est d'abord une génération qui a connu une période de prospérité beaucoup plus forte que nos parents. On a aussi fait beaucoup moins d'enfants. C'est aussi une période marquée par de nombreuses revendications, comme l'amour libre. On a aussi exploré de nouvelles carrières, en particulier dans les sciences sociales. On a baigné dans cette mouvance de la Révolution tranquille, de l'ouverture sur le monde.

Cette génération arrive à l'âge de la retraite. Quel genre de retraités feront-ils?

Ce sont des gens qui ont travaillé beaucoup, mais dans des conditions relativement faciles pour la plupart. Plusieurs ont rencontré des difficultés importantes, je pense entre autres au nombre de divorces. Mais sur le plan économique, la plupart s'en sont très bien sortis. Plusieurs ont été actifs socialement et tiennent à le demeurer. En même temps, cette génération veut s'offrir des loisirs, voyager, profiter de la vie.

Ce ne sont pas des choses qu'on entend souvent à la consultation sur les conditions de vie des aînés.

Il faut faire une distinction entre le vieillissement de la population et le vieillissement comme expérience individuelle. Dans les deux cas, nous observons une vieillesse à deux vitesses. D'abord, il y a les gens de ma génération, qui ont 60, 65 ou 75 ans, qui sont en bonne santé, qui ont des loisirs, qui consomment, s'engagent et ne coûtent pas cher à l'État en termes de soins. Ensuite, on retrouve ce qu'on pourrait appeler la grande vieillesse, qui survient autour de 75 ans et qui coûte beaucoup plus cher. Elle vient plus tard qu'avant et dure moins longtemps. Ce qui nous porte à croire que ça ne coûtera peut-être pas aussi cher qu'on le pense. Les mécanismes que nous avons mis en place pour permettre aux gens de demeurer à la maison longtemps font en sorte que la période où les personnes âgées ont besoin de soins soutenus est beaucoup plus courte.

Quand on aborde le vieillissement du point de vue de la masse, démographique, on se heurte à la réalité qu'il y en aura de plus en plus avec les boomers qui s'en viennent. Ces dernières années, le discours a changé. On a cessé de voir le vieux comme un grabataire chancelant, mais comme une menace qui pèse sur la société et qui risque de vider les coffres de l'État, les caisses de retraite, etc. Puis il y a l'autre vision qui dit que ça va faire du bien à la société qu'on ralentisse un peu la cadence.

Dans une vingtaine d'années, les retraités compteront pour près du quart de la population québécoise. Quels seront les impacts de cette réalité?

Il va y avoir beaucoup de personnes seules, surtout des femmes, puisqu'elles vivent généralement plus longtemps. Il y aura moins de frères ou de soeurs pour prendre soin des personnes malades, puisqu'ils seront moins nombreux et plus dispersés. Il y aura beaucoup d'immigrants, dont on ne parle pas encore beaucoup. Un autre facteur qui m'inquiète est le nombre de joueurs pathologiques que nous risquons d'avoir parmi les aînés si la tendance actuelle se maintient. Et il y a les gens actifs, en forme, aisés et engagés qui seront beaucoup plus nombreux que maintenant.

Qu'attendez-vous de la consultation sur les conditions de vie des aînés?

D'abord, c'est un bel exercice démocratique. Mais j'ai des inquiétudes face à un ministère des Aînés. Ça apparaît d'abord comme une réponse à quelques considérations politiques. Ma principale crainte, c'est qu'on cristallise le débat entre les aînés et les autres. J'aurais préféré qu'on crée un ministère des Générations. Évidemment, je serais bien content si la consultation corrigeait certaines lacunes du système. Par exemple, en injectant davantage d'argent dans les soins à domicile. Parce qu'il y en aura de plus en plus de personnes âgées qui ne peuvent subvenir à leurs besoins. On a tenu le pari des soins à domicile parce que ça coûtait moins cher, mais les familles n'ont pas pris le relais.

Il y a quand même certaines réalités incontournables reliées à l'âge. La plus frappante pour moi est la réduction de l'espace de vie. On se déplace de moins en moins, en commençant par abandonner la voiture. Même à pied, c'est de plus en plus difficile. Ma mère a 94 ans et mon père, 93. Ils vivent tous les deux dans leur maison. Mais tout s'est réduit autour d'eux. Tous leurs frères et soeurs sont morts. Les amis aussi ont disparu. Leurs besoins de consommation ont diminué.

Le paradoxe, c'est le corollaire positif de la situation: l'enrichissement, la sagesse et l'expérience qui viennent contrebalancer. Betty Friedan disait que la vieillesse est le seul moment où on a le privilège de réfléchir sur le sens de sa vie et le sens de la vie en général. Ce n'est pas à 8 ans qu'on se pose ces questions, ni à 22 ans. C'est quand on a le temps et le recul.

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5 mars 2005 6 05 /03 /mars /2005 16:09

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Fisette, Gilles

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"Une personne qui vieillit bien est une personne qui prend des risques, qui est ouverte à de nouvelles expériences."

Richard Lefrançois vieillit bien. La vieillesse ne luit fait pas peur. Elle est son amie. Il en a d'ailleurs fait son champ d'étude, un sujet qui le passionne depuis une vingtaine d'années. Sociologue de formation, il peut être considéré en fait comme l'expert de la vieillesse.

Du temps où il était professeur au département de psychologie de l'Université de Sherbrooke, il a mis sur pied le premier certificat en gérontologie. En 1988, il a participé à l'élaboration de la première maîtrise en gérontologie au Canada. En 2003, il a fait la même chose pour le doctorat, où il a pu, il y a quelques semaines, donner un cours à titre de professeur invité. À la retraite de l'enseignement mais toujours professeur associé, il demeure chercheur. Il travaille présentement pour l'Institut universitaire de gériatrie.

"La vieillesse est un laboratoire extraordinaire pour comprendre le monde dans lequel on vit. Qu'est-ce qu'on propose aux personnes âgées? C'est quoi l'alternative à leur disposition? Quel sens donnons-nous à cette période de la vie? Cela nous amène à nous interroger. On parle beaucoup de mondialisation, de révolution. Il y a quatre grandes révolutions dont la révolution de l'âge. L'espérance de vie ne cesse de croître. Il y a de plus en plus de centenaires. C'est l'avènement de l'homo senectus. Nous entrons dans l'ère de l'homo senectus, l'homme vieillissant. Dans trente ans, nous passerons plus de temps à la retraite qu'au travail, durant notre vie. Et c'est d'autant plus vrai que les gens entrent de plus en plus tard sur le marché du travail et n'occupent souvent que des emplois précaires."

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Question d'actualisation

Il a notamment fait une étude sur la conduite automobile et les personnes âgées, laquelle a démontré la stratégie de compensation, à la fois consciente et inconsciente, mise en place par les aînés pour pallier au ralentissement des réflexes et à la détérioration des sens comme de la souplesse physique.

Il a aussi piloté une importante étude longitudinale durant sept ans auprès de 900 personnes de Sherbrooke et de Trois-Rivières. Il a cherché à mieux comprendre comme les personnes âgées vivaient trois événements principaux qui peuvent marquer ce groupe d'âge: la retraite, la perte du conjoint ou d'un être cher et la perte d'autonomie.

"Nous avons pu développer un instrument pour mesurer comment les gens pouvaient s'épanouir, à cet âge-là. C'est l'actualisation du potentiel. Nous avons découvert que c'était le meilleur mesureur de la réussite. Qu'est-ce que qu'une personne actualisée? C'est une personne qui est ouverte aux expériences, qui accepte de prendre des risques - je ne veux pas dire d'aller grimper une montagne à 90 ans -, qui ne se laisse pas influencer par les autres, qui est autonome psychologiquement. Finalement, on a découvert que l'autonomie psychologique est bien plus importante que l'autonomie physique, que l'autonomie fonctionnelle."

D'ailleurs, M. Lefrançois ne croit pas que les standards valorisés sur le marché du travail, ceux de performance, de rendement, d'efficacité, sont ceux qui doivent continuer de s'appliquer pour les retraités. Il y a, dit-il, un droit à ne rien faire, à ne pas être actif à tout prix.

"J'aime jouer"

Visiblement, Richard Lefrançois s'amuse. Le chercheur sérieux peut effectivement être aussi quelqu'un qui joue.

"Un des traits de ma personnalité est que j'aime jouer, faire des expériences. Ainsi, par exemple, quand je faisais de la photographie argentique, au lieu de garder les mêmes techniques, j'aimais découvrir de nouvelles formules chimiques. Je faisais venir des papiers différents de Californie. Je crois que, quand on se donne des contraintes, on perd en spontanéité... C'est une de mes contradictions. Autant, je peux être rigoureux quand je fais de la recherche, autant je peux être négligent avec les règles et aimer tester toutes sortes de choses, faire des expériences."

"Comme le montre mon goût pour le jazz, notamment pour le pianiste Thelonious Monk et les accords dissonants, j'ai à la fois un côté structuré accord et un côté rebelle dissonant. Ça en prend des moments de folie, je crois. Ça vient probablement de mes parents. Ma mère est quelqu'un de plus structuré, plus rationnel, plus pratique que mon père qui est plus comédien. Ma mère, c'est la tragédie; mon père, la comédie. Il y a donc en moi le côté fou de mon père et le côté plus sérieux de ma mère.

Cela lui permet de naviguer entre les deux tendances actuelles, l'une qui se nourrit de catastrophes et qui est à l'image de l'angoisse qui caractérise le monde post-moderne - la peur d'être malade et celle de mourir - et l'autre qui vogue sur l'angélisme.

"Il faut conquérir son temps et ne pas se le faire imposer. Il faut être plus intelligent et ne pas voir ou en noir ou en rose."

- Né à Québec, le 28 décembre 1944

- Baccalauréat en sociologie de l'Université d'Ottawa

- Maîtrise en sociologie de l'Université Carleton

- Doctorat en sociologie de l'Université Laval

- A travaillé pour la commission Laurendeau-Duntonsur le bilinguisme et le biculturalisme

- A enseigné en service social, à l'Universitéde Sherbrooke, de 1972 à 1984

- A enseigné au département de psychologie, de 1984 à 2004

- A créé le certificat en gérontologie, en 1985

- A participé à la création de la maîtrise, puis du doctorat en gérontologie

- Retraité

- Demeure professeur invité et chercheurà l'Institut universitaire de gériatrie

- A écrit de nombreux ouvrages dont,le plus récent, Les Nouvelles Frontières de l'âge 

- Père d’un enfant

Passe-temps préféré: "J'ai beaucoup de passe-temps: la photographie, le piano depuis cinq ou six ans, le billard avec les amis. J'aime beaucoup faire des montages vidéo. J'aime jouer avec les logiciels informatiques. Je ne suis pas un très grand sportif même si j'ai fait beaucoup de sports quand j'étais jeune. Je fais du vélo, de la marche et du patin."

Livre préféré: "Je lis beaucoup. Mes lectures sont souvent reliées à mon travail ou à la découverte du monde dans lequel je vis. Ce sont des livres comme L'Ère du vide, de Gilles Lipovetsky."

Musique préférée: "Le jazz. Sans doute parce que c'est de ma génération. C'est aussi une musique qui va avec ma personnalité. J'aime des musiciens comme le pianiste Thelonious Monk qui joue des accords dissonants. Je suis un peu comme ça. Il y a en moi le côté rebelle, dissonant, et le côté structuré, accord."

Film préféré: "Je ne suis pas un cinéphile. J'écoute beaucoup la télévision pour me détendre. Il y a des films que j'ai vus plusieurs fois, comme La Légende du pianiste. Ou de grandes comédies musicales comme Chicago, la biographie d'Alys Robi ou le film La Grande Séduction."

Personnalité marquante: "Des gens comme le philosophe Michel Serres, Michel Foucault, Claude Lévi-Strauss, Karl Marx. Sur le plan intellectuel, je ne suis pas quelqu'un qui a une pensée unique. J'essaie de cheminer et, dans le monde dans lequel on vit, ce n'est pas facile."

Événement marquant: "Sur le plan international, je dirais la chute du communisme et du Mur de Berlin, l'effondrement de l'empire soviétique. Cela a été une bonne et une mauvaise chose, car la fin de la guerre froide a réveillé un monstre épouvantable: les Américains, la mondialisation, la logique du marché."

Dans une autre vie: "Je ferais probablement le même travail. Ou, alors, celui de comédien. Mais j'en suis un. Dans le fond, nous sommes tous des acteurs."

Animal préféré: "Les oiseaux. Pour leur liberté, leur folie. Mais je n'aime pas les animaux à quatre pattes. Je préfère les animaux à deux pattes. Mon animal préféré est peut-être l'éponge, finalement."

Principale qualité: "La persévérance, le souci de la perfection, la ténacité et le respect des autres. J'aime aussi être en groupe, travailler en équipe. Je suis exigeant sur la langue. Quand je lis un travail, je le lis deux fois. La première fois, je corrige les fautes."

Principal défaut: "Je suis impatient. J'ai de la persévérance mais pour certaines choses, je m'impatiente vite. Comme faire la file. (...)

2005 La Tribune (Sherbrooke, Qc). Tous droits réservés.

Numéro de document : news·20050305·TB·0015

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